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Actualités

ISDS, CETA, TAFTA...Tout savoir sur les accords de libre échange !

19 Juin 2019, 14:51pm

Publié par La Cgt70

Après le 52e congrès confédéral et les élections du parlement européen cette courte note a pour ambition de faire un point CGT sur les accords de libre-échange et notre position vis-à-vis de ces accords ainsi que sur la situation actuelle de l’Union Européenne à l’égard des accords de libre-échange en cours de négociation.

Les accords de libre-échange depuis quand et pourquoi ?

Sans refaire un historique complet, il faut savoir que depuis les années 1200 avec la grande charte de Magna Carta (1) des entités (2) ont cherché à supplanter l’état dans son contrôle. La finalité de tous les accords signés a toujours été pour les détenteurs de la puissance de ne pas être astreints à des règles nationales qui leur seraient néfastes.

(1) : La Magna Carta, ou Grande Charte, est un pacte conclu durant l’été 1215 entre le roi d’Angleterre Jean sans Terre et un groupe de barons en révolte. Cet accord porte sur des questions de fiscalité, de droits féodaux et de justice. La charte stipule pour la première fois une limitation des pouvoirs royaux (l’état). A l’époque, beaucoup veulent croire qu’elle annonce une nouvelle ère de collaboration entre le monarque et ses sujets.

(2) : Baron, nobles, bourgeois, entreprises …

Et maintenant ?

A travers les accords de libre-échange, les sociétés transnationales visent à se soustraire aux lois et réglementations locales ainsi qu’à l’insécurité des justices nationales. Dans les textes de ces accords, les entreprises fixent des règles qui leur sont favorables sans prendre en compte les règles démocratiques qui résultent des libres choix des citoyens.

Pourquoi sommes-nous contre les accords de libre-échange ?

La CGT n’est pas contre les accords de libre-échange ; elle s’oppose aux accords de libre échange qui affaibliraient la démocratie des peuples en passant par-dessus les lois fixées dans chaque pays, qui bloqueraient l’évolution de la société et l’empêcheraient d’aller vers une société plus progressiste et vers un meilleur bien-être (3) pour les travailleurs.

(3) : Avec tout ce que sous-entend le terme bien-être : Conditions de vie et de travail, protection sociale, salaires, pensions …

C’est loin de nous et des préoccupations des travailleur·euse·s, pourquoi se mobiliser contre, alors qu’il y a tant de mobilisation urgente à faire ?

Un exemple : Un pays décide de limiter le renouvellement des concessions d’exploitation des hydrocarbures dans le but de protéger l’environnement et d’aller dans le sens du respect des accords de Paris. Une entreprise transnationale considérant que le non renouvellement de sa concession serait néfaste à ses intérêts et fait donc savoir au gouvernement en question que, dans cette hypothèse, elle porterait plainte devant un tribunal privé transnational en demandant de forts dédommagements. C’est de la Science fiction. Cela n’arrivera jamais.

Pourtant, c’est bien ce qui s’est passé avec la Loi française du 30 décembre 2017 sur la fin des hydrocarbures, dite « Loi Hulot ». Dans le cas de la Loi Hulot, la compagnie pétrolière canadienne Vermilion s’est limitée à brandir la menace d’une procédure en arbitrage international ISDS (4) pour décourager le gouvernement de poursuivre son dessein initial. Elle s’appuyait sur le traité de la charte de l’énergie. Elle s’est donc adressée au Conseil d’Etat, lequel a transmis le message au Premier Ministre. Le gouvernement a cédé. Résultat : au lieu de mettre comme prévu un terme définitif à l’exploitation des hydrocarbures à l’échéance des 62 concessions actuelles, cette loi leur accorde un sursis jusqu’en 2040 … Voire au- delà, si leurs titulaires arrivent à prouver qu’ils n’ont pas rentabilisé leurs investissements initiaux ! Et cela s’est passé dans le pays qui a organisé la conférence de Paris … Une seule entreprise a contraint un gouvernement à mettre un genou à terre avec une simple menace au détriment des décisions prises par un gouvernement élu démocratiquement (5) . Certains prétendent même que c’est une des principales raisons de la démission de Nicolas Hulot.

 

2 autres courts exemples :

En 2010, la Tampa Electric a obtenu 25 millions de dollars du Guatemala en s’attaquant à une loi plafonnant les tarifs de l’électricité. Que se passerait-il si une entreprise d’énergie privée attaquait le tarif réglementé d’EDF ? En 2011, le groupe français Veolia est parti en guerre contre l’une des seules victoires du « printemps » 2011 remportée par les Egyptiens : l’augmentation du salaire minimum de 400 à 700 livres par mois (de 41 à 72 euros). Une somme jugée inacceptable par la transnationale, qui a porté plainte contre l’Egypte, le 25 juin 2012, devant le CIRDI (6) . Motif invoqué : La « nouvelle loi sur le travail » contreviendrait aux engagements pris dans le cadre du partenariat public-privé signé avec la ville d’Alexandrie pour le traitement des déchets. Encore en cours, la plainte de Veolia a été déposée au nom du traité d’investissement conclu entre la France et l’Egypte.

(4) : L’âme damnée des accords de libre-échange. L’ISDS est un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (en anglais Investor-state dispute settlement, ISDS). C’est un instrument présent dans de nombreux traités de libre-échange, qui permet aux entreprises d'attaquer un État devant un tribunal arbitral international.

(5) : Quoiqu’on pense de ce gouvernement.

(6) : Le CIRDI est la principale institution au monde dédiée au règlement des différends relatifs aux investissements internationaux

Ces tribunaux privés ont le droit de s'affranchir des droits nationaux et de faire condamner un Etat (donc ses contribuables) à des amendes énormes au profit des investisseurs étrangers mécontents d'une mesure d'intérêt général prise par cet Etat dans lequel ils auraient investi. Les audiences y sont souvent tenues à huis clos et ne sont ouvertes ni au public, ni à la presse, sauf accord des deux parties. Une sentence ne peut être publiée qu’avec le consentement des deux parties.

Ces 2 conditions violent l’article 14 de la déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (7)

(7) : Les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée.

 

Comment faire ?

Il faut initier et relayer les campagnes contre les accords de libre-échange qui ne vont pas dans le sens du progressisme et bloque toute évolution en France et en Europe. Il faut participer aux collectifs mis en place avec d’autres acteurs.

La CGT avec le collectif « STOP TAFTA » (https://www.collectifstoptafta.org/) ont gagné contre le TAFTA.

Nous devons gagner contre les autres. Une campagne Européenne a lieu en ce moment contre les ISDS, il faut le faire savoir, la relayer : https://www.cgt.fr/actualites/europe/mobilisation/lancement-de-la-campagneeuropeenne-stop-impunite

Pour rappel, la CGT exige :

- Que les accords comportent obligatoirement des clauses sociales imposant un mieux disant pour les travailleur·euse·s tant européen·ne·s que de l’autre partie concernée avec abandon des négociations si la partie adverse refuse l’inclusion de cette clause dans l’accord et des mesures de suspension ou d’annulation de l’accord en cas de non-respect de cette partie ;

que la référence aux accords de Paris et à leur respect soient clairement indiqués avec abandon des négociations si la partie adverse refuse l’inclusion de cette clause dans l’accord et des mesures de suspension ou d’annulation de l’accord en cas de non-respect de cette partie ;

que le devoir de précaution soit respecté quant à l’importation de produits ou de marchandises en Europe avec abandon des négociations si la partie adverse refuse l’inclusion de cette clause dans l’accord et des mesures de suspension ou d’annulation de l’accord en cas de non-respect de cette partie;

que les négociations de l’accord aient lieu de façon transparente avec consultation obligatoire des organisations syndicales et des organisations associatives concernées et prise en compte de leurs observations.

Le point sur les accords en cours de négociation ou de finalisation (non exhaustif) : ​​​​​​​

- CETA - ratification en France : nous n'avons toujours aucune date, ni-même d'indices sérieux sur le fait que cela ait lieu d'ici fin juillet ou à l'automne ; JeanBaptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, n'a rien indiqué lors du comité de suivi des accords commerciaux du 21 mai ; on sait juste que certains bouts des études d'impact sont en cours ou déjà faits.

- TAFTA bis : de premières discussions informelles ont eu lieu ; Malmström (commissaire UE au commerce) et Lighthizer (son alter-ego US) se sont vus en marge d'une rencontre de l'OCDE ; il en ressort publiquement que UE et EU ne sont pas d'accord sur le contour des négociations (les Etats-Unis voulant toujours qu'elles portent également sur l'agriculture). En parallèle, Trump a donné 180 jours pour que ces négociations aboutissent, repoussant d'autant sa menace de taxer le secteur automobile ; à ma connaissance il n'existe pas de calendrier public de négociations ; lors du dernier Conseil UE des affaires étrangères consacré aux questions commerciales, il a été répété que "l'UE se tienne prête à entamer des discussions constructives".

- Vietnam : lors de ce même conseil, il a été confirmé que "l'adoption et la signature d'un accord de libre-échange et d'un accord de protection des investissements entre l'UE et le Vietnam devraient avoir lieu d'ici fin juin 2019" ; de manière identique aux accords avec Singapour, il y aura plusieurs accords, et les parties commerce et investissement seront dissociées ; Ce seront certainement les premiers accords qui arriveront ensuite devant le nouveau Parlement européen. -

Mercosur : si la France semble rester extrêmement critique sur la possibilité de finaliser un accord commercial UE-Mercosur, notamment pour les craintes qu'il fait peser sur le secteur agricole, la finalisation d'un accord semble n'avoir jamais été aussi proche. Cecilia Malmström a affirmé, en marge de la réunion de l'OCDE, que des "progrès étaient en cours" et que cette commission souhaiterait finaliser un accord d'ici la fin de son mandat (fin octobre 2019).

- Australie, Nouvelle-Zélande, Chili, Indonésie : selon le dernier Conseil de l'UE, les négociations se poursuivent. Les ministres du commerce Français et Néo-Zélandais se sont récemment vus et ont confirmé leur volonté d'aboutir à un accord.

- OMC : l’UE, le Canada, et d’autres multiplient les déclarations et initiatives pour "rénover" l’OMC et assurer la pérennité de son organisme des règlements des différends. Aucune issue rapide ne semble sur les rails.

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