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Actualités

Le Royaume Uni entre Brexit et crise sanitaire

24 Mai 2020, 17:44pm

Publié par La Cgt70

Les Britanniques sont désormais durement atteints par la pandémie. Cette tragédie s’ajoute à la gestion d’un Brexit qui n’a rien de secondaire, et qui reste un défi tout entier à relever. Rarement le Royaume-Uni ne fut aussi meurtri qu’en ce printemps 2020. À l’image de son Premier ministre malade, son avenir suscite la plus grande inquiétude.

Les négociations avec Bruxelles, déjà soumises à un calendrier difficile à tenir avant la crise sanitaire, sont au point mort, ce qui laisse planer l’incertitude sur le devenir des travailleurs qui subiront l’impact de cette sortie de l’Union Européenne (cf. les notes précédentes). En effet, difficile d’imaginer comment un accord très ambitieux dès le départ, pourrait être conclu d’ici à l’automne. C’est pourquoi le Fonds Monétaire International a plaidé pour une extension du délai permettant de négocier la relation post-Brexit de l’Union européenne avec le Royaume-Uni. Les grands argentiers craignent en effet que sans accord, les risques d’un ébranlement de la sphère financière n’ajoutent à l’incertitude du présent.

Un Brexit sans accord négocié verrait les règles de l’OMC entrer en vigueur entre les deux parties, avec le retour de droits de douane élevés et de barrières douanières. En somme ce serait l’équilibre des échanges (avec en filigrane tout l’appareil productif qui dépend des échanges avec l’Europe) qui serait touché, avec les conséquences que l’on peut imaginer sur les salariés des secteurs concernés.

Un effet inattendu de la crise sanitaire

Un tabou est cependant tombé sous l’effet de la crise sanitaire, comme dans de nombreux autres pays européens, mais dans un contexte différent. Et pas n’importe lequel. Un de ceux qui constituent les piliers du néolibéralisme : l’indépendance des banques centrales et l’interdiction qui leur est faite de financer directement les États. La banque centrale du Royaume-Uni, qui était certes déjà un objet à part avant le Brexit dans le cadre du sur-mesure dont bénéficiait le pays, a annoncé qu’elle allait financer directement les dépenses supplémentaires du gouvernement britannique liées aux conséquences de la pandémie du Covid-19, faisant fi des risques d’inflation.

L’Union Européenne pourrait-elle alors s’en inspirer et ébranler le dogme de l’indépendance de la BCE ? Rien n’est moins sûr : les ministres des finances européens continuent de s’opposer dans des réunions interminables de l’Eurogroupe pour savoir s’il est possible ou non de contourner certaines conditions dans ces temps inédits. Alors imaginer qu’ils puissent toucher à l’indépendance de la BCE et financer directement les États, principes inscrits dans le marbre des traités européens, relève encore du mythe.

Quelle leçon ?

Les bisbilles entre tenants de la finance et gardiens du temple de l’orthodoxie monétaire ne nous intéressent pas de prime abord. Leurs intérêts ne sont pas les intérêts des peuples ni ceux des travailleurs. A ce jeu de la finance, le peuple et les travailleurs sont toujours perdants. Sauf à reprendre politiquement la main et à laisser aux banques centrales, et notamment à la BCE, le pouvoir de financer directement les états, sans passer par la prédation des marchés financiers.

Nous ne disposons pas encore du recul suffisant pour mesurer pleinement l’impact du Brexit, il devait prendre effet au 31 décembre 2020 et tout porte à croire qu’un accord de sortie ne se fera pas avant un ou deux ans désormais. Les travailleurs britanniques et européens restent dans l’expectative.

Des milliers de faillites au Royaume-Uni, l'économie prise "en étau" 

L'économie britannique est prise en étau entre une envolée des fermetures d'entreprises et un déficit d'ouvertures de nouvelles sociétés en raison de peurs compréhensibles sur ce que l'avenir réserve. Le nombre de nouvelles sociétés a ainsi chuté de 23 %. Ces chiffres doivent aussi être lus au regard d'une économie britannique déjà mise à mal par "les incertitudes liées au Brexit". La situation de l’emploi présente des risques énormes, tiraillée entre les effets de la crise sanitaire et les conséquences d’un Brexit qui menacent les travailleurs britanniques déjà fortement précarisés et qui pourraient être maintenant exposés au risque d’un chômage massif.

L’injection massive de milliards de la part d’un Etat pourtant largement soumis au carcan libéral montre à quel point le système a failli. L’appel en renfort de la banque centrale est un véritable camouflet qui agit comme un puissant révélateur. Mais est-ce une raison d’espérer un autre chemin possible ? On peut en douter. Tout d’abord le gouvernement britannique ne s’accorde qu’une légère entorse à l’orthodoxie financière, ce qui n’augure en rien de ce que sera l’avenir. Ensuite l’Union européenne préfère de son côté voir ses économies couler, comme elle l’a fait avec l’austérité tout au long de cette décennie, voire se fracasser, plutôt que de toucher à ses propres dogmes.

Nous n’en avons pas fini avec les effets de ce Brexit et de ce qu’il peut nous apprendre de nos propres économies, une chose est certaine : seule le poids et la voix des travailleurs pourra changer durablement la donne

Note de l'espace international Cgt

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